| billet de mars 2010      
 Farrebique de G.Rouquier (1946) Le Salon de  l'agriculture à Paris s'ouvre dans une ambiance morose voire sinistre en ce  début mars, sur fond de profonde crise agricole (lait, fruits et légumes,  céréales : la « plus grave depuis trente ans » selon le ministre de  l'agriculture). Le président de la République en snobe l'ouverture, craignant  peut-être des réactions trop hostiles. On voit mal en effet Nicolas Sarkozy se  faire le chantre de la "ruralité"  comme son prédécesseur. Question  de style, de culture, de racines...Les  commentateurs aujourd'hui pronostiquent la disparition des  « paysans », ainsi dans Marianne du mois dernier (No 669) cette belle « Chronique de la mort annoncée d'un paysan français »,  narrant les graves difficultés d'un producteur de fruits provençal, lequel  dénonce pêle-mêle les centrales d'achat, les grossistes, les directives  européennes, les écologistes irresponsables, tandis que les  producteurs de fruits et légumes pourraient  devoir rembourser les aides versées par l’Etat entre 1992 et 2002, à la demande  de Bruxelles.
 Le problème  est complexe et renvoie justement à ce que le sociologue Henri Mendras constatait déjà en 1967 dans  La fin des paysans (le terme,  curieusement, revient à la mode au XXIème siècle!) : la fin d’une vieille  civilisation, où les paysans tenaient une  place centrale. « Dépossédée par la grande industrie de la production  des intrants, exclue des chaînes de transformation et d’échange des productions  végétales et animales, asservie aux contraintes du marché, la société paysanne  occidentale vit les derniers jours d’une civilisation agraire millénaire » écrivait alors Mendras en pleine révolution productiviste, celle-là même qui a  dévasté - entre autres - le sol breton, détruit les bocages, arrosé les terres  de produits « phytosanitaires » hautement cancérigènes et envoyé des  millions de paysans dans les belles villes modernes. En 1964, Jean Ferrat  exprimait cette nostalgie du « monde ancien » avec une jolie veine  poétique qui ne renvoie pas à Mistral ou à Barrès mais plutôt à celle des  communautés montagnardes rétives à l'autorité et finalement vaincues par la  société moderne (capitaliste ?)  :
 Ils quittent un à un le paysPour s'en aller gagner leur vie
 Loin de la terre où ils sont nés...
 Or, ce monde  ancien ne s’est pas effacé en un ou deux siècles d’industrialisation, mais en  une ou deux décennies de modernisation accélérée (de 1947 à 1967, pour faire  court). En 1945, les paysans représentent près de 30% de la population active,  en 1975, ils ne sont plus que 10% ; en 1995, c’est à peine 5% et de nos  jours un peu moins de 3,5%. Pendant le même temps, la production et les  rendements progressent, la taille des exploitations double, les paysans ont un  mode de vie qui les rapproche de plus en plus de celui de la grande ville et la  France s’affirme comme la première puissance agricole de l’Union européenne avec  près de 20% du produit agricole des « 27 ». La  pertinence des analyses de Henry Mendras n’est plus remise en cause, mais le  mythe paysan n’est pas tout à fait mort, loin de là, à tel point qu'il renaît  maintenant sous des formes inédites (le paysan jardinier des paysages,  conservateur des traditions, militant anti-mondialisation etc.) et qu'il finit  en 2010 par éclipser le très technocratique « agriculteur ».  Attention toutefois aux erreurs de perspectives  : l’ouvrage de H.Mendras ne comportait pas en 1967 dans son titre de point  d’interrogation : c'était bien la fin des paysans. L’historien doit  replacer cette fin dans son vrai contexte – les années 1960 – et en  l’inscrivant dans la plus longue durée, à savoir un siècle d’histoire rurale.
 En  effet,  le constat d’une fin des paysans a quelque chose de  provocateur, dans les années 1960 comme dans les années 2000. On le sait bien,  l’exode rural, l’attrait de la civilisation urbaine, la modernisation des  campagnes ne datent pas seulement de l’après-1945, en dépit d’un « retard  français » qu’on s’est plu à commenter et surtout à stigmatiser. Ce qui  change dans les années 1960/70, par rapport aux époques antérieures, c’est que   la nostalgie n’a plus d’avenir, juste une ritournelle,  pour se souvenir un peu d’un passé parfois  idéalisé. Si quelques néo-ruraux tentent l’aventure des campagnes dans les  années 1970, si les résidences secondaires, les espaces touristiques  revitalisent provisoirement le tissu rural, on ne sent poindre aucun sentiment de regret d’un  âge d’or paysan, où la terre ne mentait pas, pour reprendre le discours  pétainiste (mais Pétain est au fond l’héritier de Méline et de Barrès) mais où  l’on mentait sur les réalités du métier – quoi de plus dur que le travail  paysan ? Les films de Pagnol des années 30 et 40 ont réactivé non sans  talent le mythe moderne de la terre, mais sous la forme d’un mythe  populaire aimablement « pagnolesque » ; leurs versions  modernisées des années 1980/90 (signées Claude Berry) sont de beaux chromos  passéistes qui ne font plus guère fantasmer les spectateurs citadins. En 1946, le film documentaire de G.Rouquier, Farrebique, est un petit chef d'oeuvre mais reste imprégné de poésie lyrique et pastorale, sous des dehors naturalistes. En 1967, Alexandre le Bienheureux, avec Philippe Noiret, fait  sourire et gentiment rêver d’un monde rural comme arrêté, mais fait-il vraiment  regretter le temps passé, ce monde « qui disparaît » ?
 Examinons un  peu le mot « paysan » et ses avatars. Il renvoie à une réalité  sociale quasi féodale (paysan/seigneur), mais le terme est encore employé  jusqu’aux années 1950, de la même façon que  « ouvriers » ou « employés ». On ne parle pas de  « ruraux » et assez peu encore d’agriculteurs. Tout au plus fait-on  la distinction entre le paysan propriétaire (même petit, qui cultive sa terre ou traie ses vaches) et le fermier/métayer qui loue la terre (mais il est  tout de même un paysan) et surtout avec l’ouvrier agricole et le domestique,  qui relèvent d’un sous-prolétariat rural peu considéré (mais  « paysan » par nature). Toute la littérature « rurale »  sinon ruraliste, qu’elle soit littéraire, politique, syndicale, géographique,  cinématographique, se satisfait du mot « paysan », qu’emploie encore  volontiers un Michel Debatisse (syndicaliste puissant aujourd'hui bien oublié)  dans les années 1960.
 On peut  distinguer trois types de représentations du paysan depuis le 19ème siècle  qui vont alimenter peu ou prou le mythe paysan.
 1. Les paysans par eux-mêmes, un genre qui se  développe au 19ème siècle et surtout  au 20ème siècle grâce à quelques  autobiographies et récits de vie. Les exemples sont assez nombreux   (E.Guillaumin, E.Grenadou), assez pour constituer une sensible mémoire paysanne.  On peut associer à ce genre un récit comme celui d’Emilie Carle, institutrice  dans la montagne briançonnaise ou celui de P.J Heliaz, qui décrit son enfance  dans le milieu d’ouvriers agricoles en Bretagne. S’il est illusoire de  construire une histoire des paysans avec ces seuls témoignages, nul doute que  cela permet de ne pas s’en tenir aux seules statistiques et aux généralités. On  peut y associer certaines chansons paysannes, des contes aussi, où il est  question des misères et des peurs (loups, chiens, incendies), les  superstitions, les sorciers et sorcières (encore en 1963 un briquetier rural  des Ardennes assassina un sorcier qu’il suspectait d’avoir jeté un sort sur ses  fours !).
 2. Les  représentations que l’on se fait des paysans, notamment dans le milieu urbain  mais aussi dans la presse, la littérature, le cinéma, les affiches, la  publicité, la radio et la télévision. Les exemples sont évidemment très nombreux et on ne peut ici en faire la synthèse. La  littérature reste d’une aide précieuse, surtout celle du 19ème siècle. Dans La Terre, Zola se  veut naturaliste et il dresse un portrait sans complaisance du monde paysan,  brutal, grossier, âpre au gain. On est en réalité un peu dans le même monde des  « peaux-rouges » de Balzac dans Les  paysans. Dans ces deux ouvrages, les romanciers donnent une vision  extrêmement sombre du monde rural : brutalité, violence, âpreté au gain,  dévergondage précoce. Chez Balzac, des paysans tuent un garde forestier pour  intimider leur propriétaire qu’ils réussissent à chasser et chez Zola, des  enfants tuent leur père après qu’il leur a fait donation de sa terre ! La  violence paysanne relève en partie du darwinisme social. A l’inverse, Giono  chante la terre, une Provence certes moins idyllique que celle de Pagnol, mais  c’est une terre de la renaissance. Delteil, d'origine paysanne (pauvre) fréquente le Tout Paris des années folles pour (re)devenir un écrivain-paysan au milieu des vignes languedociennes.
 Quoi qu’il en soit, l'historien E.Weber (La fin des terroirs) a bien montré que  l’image triviale du paysan (bouseux abruti, mal fagoté, miséreux) est bien  ancrée dans les villes dès le milieu du 19ème  siècle et les paysans tendent à souffrir d’un complexe d’infériorité (Il faut  dire que certaines pratiques (la vente des cheveux des femmes, par exemple) ne  fait rien pour redorer le blason paysan). Une vision qui a perduré au siècle suivant. 3.  Les études « scientifiques » sur le monde paysans se sont multipliées au  XXème siècle, avec l'essor des sciences humaines et sociales
 - Les études géographiques, assez nombreuses,  certaines ayant marqué leur époque (Gravier, Demangeon, Bonnamour), à travers  la travers l’étude de l’espace rural, du paysage rural (et agraire), de l’exode  rural etc. En 1905, A.Demangeon soutient une thèse pionnière sur la Picardie.
 - Les études sociologiques, qui vont des  enquêtes sociales, des « visites » aux paysans aux études de la  sociologie moderne (Mendras, G.Wright). Ainsi G.Wright étudie t-il notamment le  village d’Epagny dans le Soissonnais.
 -  Les études historiques (qui croisent parfois la sociologie, ainsi chez  D.Halévy, G.Wright) : on pense aux grandes thèses d’histoire rurale, au  «couronnement » de l’Histoire de la  France rurale, parue au Seuil sous la direction du médiéviste G.Duby,  lui-même spécialiste de l’histoire des campagnes médiévales. Les années 1960-75  sont d’ailleurs la période faste de l’histoire rurale, dans une sorte de  recherche des racines d’un monde qui disparaît. L’un des noms importants de  l’histoire rurale contemporaine est Philippe Vigier (sur la propriété foncière)  mais on note aussi de nouvelles approches, ainsi les cultures politiques au  village (M.Aguhlon), l’histoire des sensibilités rurales (Le Limousin dans la  belle thèse d’Alain Corbin, les univers sonores). Depuis quelques années, de  nouveaux champs historiques sont apparus, ainsi l’histoire des femmes rurales,  l’histoire de la pluriactivité, l’histoire du paysage, mais l’histoire rurale  est en net déclin (sauf sur les traces d’Agulhon ou de Corbin et dans le  domaine de la micro-histoire). C'est un peu dommage, mais n'est-ce pas le signe  que les paysans n'intéressent plus beaucoup les élites intellectuelles.
 A partir des  années 1950, le mot de « paysan » devient de plus en plus péjoratif  (=cul-terreux) et « ringard ». Les comiques s’en amusent (Fernand  Raynaud, lui-même de souche auvergnate fait rire avec son « j’suis  qu’un pauv’paysan », qui véhicule le cliché du paysan qui se plaint mais  qui est en réalité avare et bien plus riche qu'il ne laisse paraître (le  célèbre « ça eu payé !»). En 1969, les Charlots brocardent le paysan  aviné dans une veine comique parodique (à partir d’une chanson de G.Moustaki,  Le Métèque), mais  qui en dit  long sur l'air du temps (on en rigole  grassement) :
 
 Avec ma  gueule de pauvre mecDe paysan au profil grec
 Qu'aurait eu comme un accident (...)
 Le pauvre  mec !
 
 Le  « paysan-pauvre mec » est donc mal parti au début de l’ère Pompidou,  pourtant lui-même aux racines paysannes cantaliennes pas si anciennes. On va  lui préférer « agriculteur » (dans les statistiques de l’INSEE),  « cultivateur » (le mot préféré des sondages sous la IVème  République), viticulteur, maraîcher, exploitant-agricole, éleveur, en bref des  dénominations plus économico-statistiques et « modernes ». De plus,  le « nouveau paysan » se définit de moins en moins comme une « classe   populaire », mais de plus en plus comme une variante rurale des classes  moyennes, les plus aisés devenant des notables et/ou des entrepreneurs. On voit  dans les années 1970 les « paysans » partir au sports d’hiver ou au  « Club Med », ce qui a de quoi intriguer les anciennes générations.  En 1947, un sondage montre que 68% des paysans se reconnaissent, non dans une  « classe pauvre », mais une « classe moyenne », certes à  divers niveaux de richesse, mais l’évolution des mentalités est décisive.  Il faudrait aussi faire une place au  féminin dans la galerie des stéréotypes. Les « paysannes » sont  nombreuses, mal connues, souvent dans l’ombre de leur mari. Beaucoup sont des  salariées agricoles, mais on trouve aussi des chefs d’exploitation (elles  représentent déjà 13% de cette catégorie en 1926). Nul doute que la  « paysanne », souvent représentée sur les peintures, les  photographies des cartes-postales est un maillon essentiel de l’économie  rurale, et cela depuis le 19ème siècle.
 Pourtant si  le terme de « paysan » n’a guère survécu à l’évolution de la langue  technocratique, il est réapparu paré de toutes les vertus morales depuis une  quinzaine d’années, au fur et à mesure de son déclin démographique et  sociologique. Finies les caricatures grossières, comme celle de Louis de Funès en paysan dans le film (débile) La soupe aux choux (1981). Les cinéastes nous dressent le portrait intimiste d'un monde qui paraît à l'agonie mais qui porte certaines valeurs d'authenticité : les paysans cévenols de Raymond Depardon dans La vie moderne (2008), ceux de l'Aveyron filmés 40 ans après Farrebique par Rouquier dans Biquefarre (1983).
 
 On entend au début du XXIème siècle Jacques Chirac,  alors président de la République,  mais aussi ancien député de la Corrèze et défenseur affiché du monde rural,   affirmer que « nous sommes tous des paysans », ce qui pourrait  tout aussi bien signifier que nous ne somme plus du tout des paysans, mais des  descendants de paysans ! Et voici Chirac en septembre 1999, dans un discours  aux accents quasi méliniens/barrésiens  :  La  ruralité correspond à une aspiration profonde de notre peuple. Pas seulement  parce qu'il y trouve ses racines. La ruralité n'est pas une nostalgie ; elle n'est  pas une valeur du passé inadaptée à notre époque. Elle est d'abord une éthique  : l'homme ne vit pas sans la terre ; il vit avec la terre et se nourrit de la  terre. La culture humaine et la culture de la terre sont en réalité  indissociables. Nous sommes tous des paysans, au sens éthique du terme.  L'éthique paysanne est le lien entre le passé, nos racines et notre histoire...  Il n'y a pas de pays sans paysans.» Mais les  paysans ont en fait bien résisté : ils se sont même adaptés de façon  remarquable aux transformations du pays. Du moins jusqu’à ces dernières années.
 De  nombreuses secousses  ont ébranlé le monde paysan de 1870 à 1970 sans  jamais le faire disparaître : crises économiques, surproductions (vin,  céréales, fruits), parasites, calamités climatiques, désastres des guerres  (surtout 14-18, grande saignée des campagnes, mais aussi en 1940,  sous-estimée : 80 000 paysans tués et 700 000 agriculteurs prisonniers),  malthusianisme démographique et exode rural, remembrement rural, productivisme et agro-business et plus  récemment  effets très contrastés de la  politique agricole commune et des quotas...
 Le rêve  d'une France épargnée des marées par ses digues paysannes a bercé d'illusions  le premier XXe siècle, jusqu’à Vichy.  Au recensement de 1936, le pays était devenu cette « île heureuse » dans un monde bouleversé par l'industrialisation  et l'urbanisation : 32 % des Françaises et des Français travaillaient dans  l'agriculture, 34 % dans l'industrie, 34 % dans les services. Sur une  population totale de 41 millions d'habitants, 48 % vivaient à la campagne.  Cette France paysanne protégée par la ligne Maginot puis exaltée par le  maréchal Pétain une fois la ligne franchie semblait bien éternelle. L'exode  rural avait été ralenti, mais, en 1958 encore, au lendemain de la signature du  traité de Rome qui créait le Marché commun, l'agriculture française était  incapable de nourrir la France, le taux de couverture des importations par les  exportations n'étant que de 47 % ! Un record de sous-productivité peu banal.
 Au fond  après plus d’un siècle de résistances plus ou moins fortes et de poussées  protectionnistes et agrariennes, le « paysan » s'est adapté à la  modernité libérale, ce qui signifie pour lui (ou du moins l’archétype social  qu’il incarne depuis les temps médiévaux) sa quasi disparition. Les lois Debré  et Pisani (5 août 1960 et 8 août 1962) donnent le signal du grand  chambardement. Elles partent aussi d’un constat sans appel : en 1958  encore, au lendemain de la signature du traité de Rome, l'agriculture française  est incapable de nourrir la France, le taux de couverture des importations par  les exportations n'étant que de 47 % !   Mobilité, concentration, recours au crédit sont les trois axes d’une  politique visant à faire entrer l’agriculture française dans le XXème siècle,  tout en réaménageant le territoire français. « Aménager le territoire,  c'est prendre conscience de l'espace français comme richesse et comme  devoir » déclare en 1956, Edgar Pisani, qui devient dans les années 1960  l’un des ministres de l’Agriculture les plus « modernisateurs » du  siècle.  L’élevage intensif devient  l’arme du développement, de nouvelles cultures et méthodes sont introduites,  les rendements à l’hectare doublent ou triplent selon les secteurs d’activité,  la mécanisation est très spectaculaire. L’agriculture devient dans les années  60-70 capitalistique, avec une course effrénée à la productivité, en liaison  avec la puissante industrie agro-alimentaire (20% de la population active, avec  BSN, Béghin-Say, Nestlé , Besnier etc) et qui fait désormais…la pluie et le  beau temps !
 Un  demi-siècle après le plan Pisani, la France agricole (mais aussi toute l’Europe  verte) connaît la plus grave crise de l’après-guerre, avec une baisse des  revenus qui met dans le rouge des dizaine de milliers d’entrepreneurs  (= le mot pour paysan moderne),  particulièrement dans le secteur de l’élevage laitier. Les cours apparaissent  très volatiles, les écarts de prix entre les producteurs et les distributeurs  de plus en plus excessifs, tandis que les charges fixes augmentent (coût de  l’énergie notamment) et que les subventions européennes ne suffisent plus à  combler les déficits. Alors que les paysans ne représentent plus une force  électorale déterminante, les hommes politiques en comprennent la valeur  symbolique (leur mort c’est celle de la France) et retrouvent le chemin de la  terre et de leurs racines. On va donc voir au Salon de l’Agriculture  Jean-Pierre Raffarin, le fils d’un cultivateur poitevin, Martine Aubry,  la fille du Corrézien (mais pas paysan !)  Jacques Delors, François Bayrou le Gascon, fils d’agriculteur et photographié  sur son tracteur, François Fillon, qui rappellera ses origines sarthoises à  défaut d’être tout à fait paysannes   etc. Il va sûrement être question de « plans d’urgence» susceptibles de redonner de la compétitivité à un secteur  en perte de vitesse, en misant notamment sur la recherche et l’innovation  (thème du Salon). Mais il est clair qu’en 2010 on ne peut se satisfaire d’une simple réorganisation des marchés  internationaux. Il s’agit de renoncer à pratiquer l’agriculture telle que nous  la connaissons aujourd’hui – et qui mène à des catastrophes financières comme  sanitaires - pour développer une agriculture durable (et non  « raisonnée ») en France comme dans toute l’Europe communautaire. De  ce point de vue les orientations du RAD ou de la branche développement durable  de l’INRA apparaissent comme des solutions viables à moyen terme.
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